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La prosopographie est une discipline ambitieuse qui entend ou prétend rassembler et étudier l’ensemble de la documentation disponible pour une période historique donnée afin de reconstituer la structure et l’évolution d’un groupe humain déterminé. Il est dès lors indispensable de prendre conscience des limites, des travers et des manques des sources conservées. Ces biais sont d’autant plus importants quand on s’intéresse aux femmes qui, jusqu’à une date récente, étaient davantage spectatrices qu’actrices d’une histoire écrite, occupée, incarnée par des hommes de manière souvent exclusive. L’idée d’appliquer la méthode prosopographique à un groupe spécifiquement féminin s’inscrit dans le développement plus général de l’histoire des femmes à partir des années 1970, et il faut saluer l’œuvre désormais pionnière que Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier a consacrée aux femmes de l’ordre sénatorial du Haut-Empire.
Depuis les années 2000, d’autres études ont vu le jour et porté sur les femmes les mieux documentées, c’est-à-dire celles qui appartiennent à la classe dirigeante. Dames du Moyen Empire égyptien, entourage féminin des diadoques d’Alexandre le Grand, femmes évergètes du monde hellénistique, notables de l’Hispanie romaine ou grandes aristocrates du Mezzogiorno médiéval constituent autant de groupes féminins récemment étudiés qui ont en commun d’être associés de près au pouvoir des hommes qu’elles soutiennent ou suppléent plus qu’elles ne les concurrencent. Il se pose alors la question de savoir si la prosopographie féminine est par essence plus élitiste, plus restrictive et plus biaisée que la prosopographie masculine en raison de la mention plus rare des femmes dans la documentation antique ou médiévale. L’onomastique permet sans doute de nuancer cet aperçu sommaire a priori négatif en révélant comment et combien l’étude sérielle des noms féminins de catégories parfois modestes offre la possibilité de pouvoir écrire une histoire des femmes qui ne soit pas uniquement celle des impératrices et des sénatrices. Il nous semble par conséquent opportun de nous interroger, pour ce troisième atelier prosopographique, sur les rapports tissés -dans les travaux sur les femmes et le genre- entre l’étude des personnes et celle des noms. Comment s’entrecroisent les considérations biographiques/sociologiques et philologiques, quelles avancées les unes permettent-elles dans le champ des autres ?
PROSOPOGRAPHIE ET ONOMASTIQUE FÉMININES
Samedi 25 mai, INHA, salle Mariette
Atelier organisé par Robinson Baudry, Madalina Dana, Sylvain Destephen, Karine Karila-Cohen, et Ivana Savalli-Lestrade
La prosopographie est une discipline ambitieuse qui entend ou prétend rassembler et étudier l’ensemble de la documentation disponible pour une période historique donnée afin de reconstituer la structure et l’évolution d’un groupe humain déterminé. Il est dès lors indispensable de prendre conscience des limites, des travers et des manques des sources conservées. Ces biais sont d’autant plus importants quand on s’intéresse aux femmes qui, jusqu’à une date récente, étaient davantage spectatrices qu’actrices d’une histoire écrite, occupée, incarnée par des hommes de manière souvent exclusive. L’idée d’appliquer la méthode prosopographique à un groupe spécifiquement féminin s’inscrit dans le développement plus général de l’histoire des femmes à partir des années 1970, et il faut saluer l’œuvre désormais pionnière que Marie-Thérèse Raepsaet-Charlier a consacrée aux femmes de l’ordre sénatorial du Haut-Empire.
Depuis les années 2000, d’autres études ont vu le jour et porté sur les femmes les mieux documentées, c’est-à-dire celles qui appartiennent à la classe dirigeante. Dames du Moyen Empire égyptien, entourage féminin des diadoques d’Alexandre le Grand, femmes évergètes du monde hellénistique, notables de l’Hispanie romaine ou grandes aristocrates du Mezzogiorno médiéval constituent autant de groupes féminins récemment étudiés qui ont en commun d’être associés de près au pouvoir des hommes qu’elles soutiennent ou suppléent plus qu’elles ne les concurrencent. Il se pose alors la question de savoir si la prosopographie féminine est par essence plus élitiste, plus restrictive et plus biaisée que la prosopographie masculine en raison de la mention plus rare des femmes dans la documentation antique ou médiévale. L’onomastique permet sans doute de nuancer cet aperçu sommaire a priori négatif en révélant comment et combien l’étude sérielle des noms féminins de catégories parfois modestes offre la possibilité de pouvoir écrire une histoire des femmes qui ne soit pas uniquement celle des impératrices et des sénatrices. Il nous semble par conséquent opportun de nous interroger, pour ce troisième atelier prosopographique, sur les rapports tissés -dans les travaux sur les femmes et le genre- entre l’étude des personnes et celle des noms. Comment s’entrecroisent les considérations biographiques/sociologiques et philologiques, quelles avancées les unes permettent-elles dans le champ des autres ?
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