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Coordonnateurs: Ouerdia SADAT YERMECHE et Farid BENRAMDANE
La connaissance de l’espace (la géolocalisation), la maîtrise des données relatives au territoire par le biais de ses dénominations (la toponymie), et celles centrées sur la personne et l’histoire de ses différents peuplements (état civil, anthroponymie, ethnonymie, etc.) relèvent de la perception des faits de langue et de culture d’une société.
À ces domaines privilégiés de l’onomastique, s’adjoignent d’autres domaines. C’est le cas d’autres domaines comme l’étude des noms propres attribués aux produits industriels et commerciaux (onomastique commerciale), à la signalétique urbaine, aux sites d’hébergement numériques territorialisés et ex-territorialisés, telles les adresses Internet (dénomination électronique ou numérique).
Les systèmes dénominatifs, à la faveur de la massification de la communication contemporaine, intègrent de plus en plus les créations onomastiques issues de l’imaginaire politique, musical, sportif, littéraire (onomastique politique et artistique), etc.
L’attribution d’un nom propre est certes un acte de liberté individuelle et/ ou collective, qui puise dans des registres très différents : le symbolique religieux et mystique, le politique, l’associatif ainsi que les patrimoines culturels. Son adoption, formelle ou informelle, dans le champ de la communication sociale (réelle ou virtuelle), son inscription officielle comme son recensement ou son changement, sa codification juridique et sa transcription graphique nécessitent des démarches institutionnelles nationales intégrées.
L’attribution d’un nom concerne à cet effet aussi bien l’identification de manière rapide et sûre d’une personne que d’un lieu, d’une entreprise, d’un édifice, d’un produit ou d’un bien.
Qu’il s’agisse d’espaces physiques ou symboliques, de peuplements ou de personnes, de créations littéraires ou d’espaces virtuels, il n’est pas exagéré de noter que le système onomastique algérien reste encore marqué par des rapports de forte proximité à une histoire nationale « mouvementée ». L’onomastique demeure à cet égard un des témoins les plus authentiques par rapport à ces repositionnements socioculturels et politiques. Force est de reconnaître, dans les travaux de la communauté scientifique onomastique, que ce qui caractérise, de manière générale le nom propre, c’est bien sa grande stabilité à la fois morphologique et sémantique.
Au-delà de la diversité des parlers nationaux, des domaines sémantiques et des catégories sous-jacentes, il existe un imaginaire onomastique local, qui est en mesure de rendre compte des différents procédés de verbalisation identitaire et identificatoire, en l’état et en devenir.
À cet effet, Foudil Cheriguen souligne qu’un type de questionnement transversal « sous-jacent caractéristique aujourd’hui des motivations profondes de l’onomastique algérienne, voire maghrébine » se résume par la question « Qui suis-je dans le rapport de nomination /dénomination de tel ou tel territoire et/ou sous -territoire déterminé par tel ou tel autre nom ? »[1].
Cette mise en perspective diachronique est de plus en plus adossée à de nouveaux domaines de l’onomastique algérienne afférant à des approches de type synchronique (sociolinguistique, pragmatique, sémiologique, cognitif…).
Depuis quelques années, de nouvelles formes d’expression onomastique, induites par l’usage des technologies de l’information et la communication issues des productions savantes ou de leurs déclinaisons populaires sont contenues dans le champ de la communication sociale courante ou spécialisée. Ces usages mettent en jeu des dynamiques variationelles et intergénérationnelles, dans des langues en situation de contacts permanents des modes d’écriture et d’expression iconique, des stratégies d’oralisation, ainsi que des procédés de conversion graphique (transcription ou translittération).
Les expressions langagières et artistiques des jeunes à travers des publications et à des créations artistiques contemporaines, « bousculent » les normes d’écriture et des modes de graphématisation bi-plurilingue. Elles sont en train de bouleverser la configuration onomastique de l’Algérie : création lexicale et discursive, pratiques scripturales et/ou verbales dans des situations de communication formelles et informelles.
Les interactions verbales portant sur la dénomination des différents messages, appareils, outils, composants et programmes nécessaires pour manipuler les nouvelles technologies dans les diverses champs de l’onomastique (commerciale, politique, numérique…) imposent une dimension empirique dans les modes de traitements en vue d’une compréhension des systèmes de dénomination et re/dénomination.
Les modes de construction / création, du point de vue sémantique et formel, de ce stock de noms propres (noms des personnages, noms des lieux, titres des chansons, noms des romans, des événements, des manifestations…), dans les slogans politiques, les évènements sociaux, les manifestations politiques, les narrations romanesques, les blagues et les anecdotes, etc., produits dans l’espace national, ainsi que celles issues de la diaspora, permettent de cerner les motivations culturelles, historiques, sociopolitiques, narratives, artistiques et esthétiques.
L’onomastique a certes un intérêt pour les historiens, les linguistes et les géographes, mais son impact est de premier ordre quand elle est soumise à des impératifs de gestion de la collectivité nationale.
Par ailleurs, plusieurs domaines, catégories, niveaux et angles d’analyse peuvent être proposés à titre indicatif, eu égard à la permanence des phénomènes de dénomination (filiation du nom propre à travers l’histoire), à la vastitude du territoire national et à la diversité des productions culturelles issues de l’imaginaire onomastique local et des repositionnements géopolitiques.
Ce numéro de Insaniyat a pour objectif de présenter des points de vue divers, eu égard au caractère langagier et linguistique du système national de dé-nomination, mais aussi à la fortune des indications théoriques, à la faveur, notamment, du développement des sciences du langage, des sciences informatiques, des sciences de la cognition et des sciences du territoire.
Pour cela, il est proposé de penser et poser le fait onomastique, tantôt dans sa généralité (macro), ses instances (micro), sa diachronie (la filiation du nom propre), tantôt dans sa combinatoire phonétique et sémantique (variation), sa dynamique (créativité), ses redéploiements dialectiques (plurilinguisme et contact des langues), pour dire autrement l’Algérie.
Interroger les noms propres à la fois comme aboutissement historique d’une longue évolution de mise en morphologie culturelle, linguistique et discursive de pratiques et vécus séculaires, avec ses gloires et ses tragédies, ses attractions et ses aversions, mais également dans ses usages contemporains les plus significatifs. En somme, interroger les noms propres de l’Algérie, c’est poser ses invariants les plus structurants, dresser ses variables les plus prégnantes et établir ses représentations mentales onomastiques dans ses dis/continuités spatio-temporelles les plus représentatives, dans ce qui fonde une totalité : l’Algérianité, processus et produit.
Les thèmes à privilégier dans ce numéro de Insaniyat cibleront les questions liées à la toponymie et à l’anthroponymie avec toutes leurs catégories en fonction des périodes historiques. On y adjoindra, à l’évidence, les thèmes centrés sur les usages onomastiques contemporains (mercatique, numérique, héméronymiques…). Les résultats de recherche sur des situations linguistiques, insistant sur les approches de terrain et la dimension comparatiste des langues et/ou des supports en usage, sous toutes les formes, en fonction des stratégies des acteurs, de l’évolution des contenus et des procédés techniques et technologiques qui les supportent (oral, graphie, matériel, couleurs, événements)…
Un intérêt sera également accordé à la dimension comparatiste des langues et/ou des supports en usage, sous toutes les formes, en fonction des stratégies des acteurs, de l’évolution des contenus et des procédés techniques et technologiques qui les supportent (oral, graphie, matériau, couleurs, événements, etc…
- Envoi des articles avec un résumé et cinq (05) mots-clés, avant le 1er septembre 2020 à l’adresse suivante insaniyat.crasc@gmail.com
- Les articles en langue arabe, française ou anglaise, doivent être rédigés conformément à la note aux auteurs de la revue Insaniyat https://insaniyat.crasc.dz/index.php/fr/notes-aux-auteurs
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